Martin le jeune, La Cavalcade le lendemain du Sacre à Reims, 26 octobre 1722, peinture, 1724, Château de VersaillesPierre-Denis Martin, dit « Martin le Jeune » (né à Paris, vers 1663, et mort dans la même ville en 1742), fut, sous le règne de Louis XIV, pourvu de pensions et de la charge de « peintre ordinaire du roi ». À ce titre, il peignit nombre de tableaux pour orner les châteaux royaux de Versailles, Choisy et Compiègne (scènes de chasse, vues en perspective des villes, des domaines princiers). Il est évident que les cérémonies du sacre de Louis XV, en octobre 1722, dont il est le témoin actif, inaugurent une nouvelle étape de son œuvre et une forme de consécration personnelle, si besoin était.
Si le souci de témoigner est si grand et la commande officielle si évidente (il faut établir aux yeux de tous la surpuissance mystérieuse d’un roi élu du ciel, investi d’une force invincible et miraculeuse), c’est que, plus que tout autre cérémonial d’État, le Sacre est essentiel dans la religion royale. Malgré l’instantanéité de la succession conférée par l’hérédité - « le roi est mort, vive le roi » -, seule cette cérémonie fondatrice confère au souverain la totalité de son pouvoir et de sa puissance. L’affaire est d’importance dans le cas des héritiers mineurs : Louis XV n’a que cinq ans en 1715, lorsque meurt Louis XIV, et il est confié aux soins de son grand-oncle, le duc d’Orléans, « régent du royaume ».
Célébré à Reims dans la cathédrale de Reims le 25 octobre 1792 par l’archevêque duc de la ville, M. de Rohan-Géméné, le sacre se déroule en plusieurs temps, en plusieurs jours : une nuit de recueillement, un jour de solennités (serments, messes, intronisation, sainte onction, hommages), le tout mêlant rites de chevalerie et cérémoniel catholique. C’est en « Roi Très-Chrétien », c’est-à-dire défenseur universel de la foi, que Louis est couronné par douze pairs du royaume. Vient ensuite le temps du festin puis, le lendemain ou le surlendemain celui de la cavalcade.
La régenceLa monarchie française a, depuis le Moyen Âge, fixé de manière stricte les règles de succession. Elle a cependant peu de règles concernant les régences. Ces périodes sont redoutées comme propices aux troubles à cause de la faiblesse alors présentée par le pouvoir royal. Louis XIV, voyant ses descendants mourir avant lui, avait donc réglé les problèmes de régence qui allaient se poser après sa mort notamment en légitimant ses bâtards. Mais le régent avait fait casser le testament de Louis XIV et devenait le successeur potentiel de Louis XV. Le principal danger dynastique venait, pour lui, de l'Espagne, dotée d'un roi Bourbon qui n'a jamais renoncé à tout droit au trône.
Le Régent, Philippe d'Orléans, à qui Louis XIV a confié le jeune roi, était donc conduit à prendre quelques libertés avec les instructions de l'ancien roi, ce afin de protéger Louis XV et de commencer à assurer son autorité. La première mesure prise par le Régent est de ramener Louis XV et la Cour à Paris afin de se rapprocher du peuple. Louis XV s'installa donc début 1716 au palais des Tuileries. Le peuple parisien se prit alors d'affection pour ce jeune roi.
La Régence marque aussi un changement d'alliances pour la France. Alors qu'elle avait auparavant noué une solide alliance avec la maison de Savoie et la maison de Farnèse, alliées catholiques, le Régent opte au contraire pour un éloignement d'avec la Croix d'or et un rapprochement avec les puissances du nord de l'Europe, revenant à la politique du siècle précédent alors que l'encerclement de la Ligue de Ratisbonne (Autriche, Espagne et Bavière notamment) se dessine durant l'année 1722. C'est ainsi qu'il renoue des contacts avec l'Angleterre et les Provinces-Unies, pourtant protestants. La Régence risque donc de laisser au jeune roi Louis XV un royaume à la fois héritier de la monarchie absolutiste de Louis XIV et des ouvertures parfois « fragilisantes » du Régent.
Le jeune monarque, n'a toutefois encore que douze ans et il devra attendre ses treize ans en février 1723 pour que soit déclaré sa majorité.